Que y a-t-il de commun entre un psychanalyste, un coco, un croyant (juif, musulman, huguenot ou catho) et Philippe Bouvard ? Ils sont tous des affreux réacs, partisans résolus de l’ordre et la morale, de la sacro-sainte tradition, des dogmes intouchables, du conservatisme le plus borné, des adeptes du statu quo, des dinosaures de la pensée figée (j’en passe et des meilleures).
En effet, ils se sont toujours trouvés, malgré des divergences évidentes sur un bon nombre de sujets, du même côté de la barrière, voire de la barricade (sans qu’on sache exactement qui était « l’idiot utile » -comme disait Lénine- de qui), dans des positions rétrogrades d’un obscurantisme aveugle. Pour mémoire : hostiles à la contraception et à l’avortement (les cocos trouvant ce genre de préoccupations éminemment « bourgeoises », comme de bien entendu); opposés à la distribution de seringues stériles et des substances de substitution (méthadone, Subutex) pour les toxicomanes, provoquant ainsi des milliers de morts; défavorables au PACS et, tout récemment, au mariage et à l’adoption des couples homos.
Concernant les différentes religions, on peut se dire que c’est « de bonne guerre » ; en tout cas, qu'on peut leur trouver disons des "excuses", car elles sont "cohérentes" avec leurs principes. Pour ce qui est des psychanalystes et des communistes, c'est sans excuse aucune et l’Histoire se chargera de leur en demander des comptes (à supposer qu'il en reste encore quelques uns...).
Vous vous dites, sans doute, que mon anti-psychanalysme (forcément primaire) est à l’origine de ce discours de procureur général. Détrompez-vous. Pour une fois, ce n’est pas moi qui le dis, mais Laurent Joffrin, éditoraliste du Nouvel Obs: "Une partie des psychanalystes, qui lisent dans Freud comme les islamistes dans le Coran, affirment la nocivité de l'homoparenté."
Mais il y a pire que Joffrin et moi réunis! Si, si, c'est possible! Car voilà que c'est justement une historienne de la psychanalyse, Élisabeth Roudinesco en personne, qui va jusqu’à dresser l’acte d’accusation vis-à-vis de ses propres coreligionnaires.
Freud, qui est Grand, sait que je ne suis pas un dévot de Mme. Roudinesco, bien au contraire ! Les habitués de mon blog sont au courant que j’ai même ferraillé avec elle (voir ici), ce qui a failli me coûter un procès. C’est pour quoi les félicitations que je lui adresse pour son texte que voici n’en sont que plus sincères (même si un esprit mal tourné comme le mien ne peut s'empêcher de se demander si sa soudaine "volte-face" n'aurait un rapport étroit avec ses récentes bisbilles avec les lacaniens...)
Si même Mme. Roudinesco est d’accord avec moi, où va-t-on ?
« Psykks, vous êtes fœtus, la Roudi est avec nous ! »
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PS. Et Philippe Bouvard, dans tout ça ? Eh bien, Bouvard est l’homme qui osa dire : « On commence par donner de la méthadone aux drogués et on finit par fournir des enfants aux pédophiles ». Aussi odieux que les récents propos du Cardinal Barbarin, à qui il ouvrit un boulevard avec quelques décennies d’avance et sans avoir ses « excuses » ...
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SUITE:
Voici un bel exemple de prose psychanalytique: "Non à un monde sans sexe". Dit comme ça, qui (à part les églises et les puritains) pourrait être pour, en effet?
Un curieux article dans Le Monde (du jour de Noël 2012, jour de la naissance d'un certain Jesus, qui semble lui-aussi avoir eu deux papas et une mère porteuse), signé par Sylvie Faure-Pragier, auteur des "Bébés de l'inconscient : le psychanalyste face aux stérilités féminines aujourd'hui" (PUF, 2003) qui se termine par cette jolie et juste phrase au caractère d'injonction : Sans une expérience clinique réelle, les psychanalystes ne peuvent se substituer ni à l'opinion publique ni au législateur. D'ici là, "taisons-nous !"
Et, enfin, un psychanalyste patenté qui ose dire clairement que la psychanalyse, du moins sous sa forme lacanienne, est carrément réactionnaire et n'est que la version laïcisée de la réligion chrétienne (choses, toutes les deux, que que j'ai toujours défendues), prenant presque, au passage, la défense du film Le mur, de Sophie Robert. A lire ABSOLUMENT!!!
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Puis la Roudinesco récidive, persiste et signe. Bravo, Madame!
" Il faut balayer devant nos portes. La psychanalyse a été dominante pendant cinquante ans, et aujourd’hui elle est en voie de marginalisation. Pourquoi ? Certains d’entre nous portent une lourde responsabilité.» Et de prendre un exemple de ces rendez-vous ratés : «Regardez les homosexuels ! Ils ont gagné, car ils se sont battus contre les psys qui les prenaient pour des malades. Ils ont créé de vraies luttes politiques. Aujourd’hui, cela ne suffit pas de protester, il faut se réveiller, faire de la vraie politique, il faut penser à de nouvelles relations, par exemple avec les patients." (Intervention dans à la tribune des Assises citoyennes pour l’hospitalité en psychiatrie, le 1er et le 2 juin à Villejuif, rapportée par Eric Favereau dans Libé)